Arrêté en pleine réunion au siège de son parti, hier dimanche 14 février à 14 heures, le député d’opposition Martin Fayulu Madidi a été amené au camp Lieutenant-colonel Kokolo pour y être – selon Lambert Mende, Porte-parole du gouvernement – entendu. Malgré sa libération tard dans la soirée, son arrestation a suscité des vives protestations dans la capitale congolaise.
A un jour de la journée déclarée « ville morte » par une frange de l’opposition, la tension monte à Kinshasa. Et l’enlèvement ou l’arrestation de Martin Fayulu vient en rajouter la teneur.
Ce député et président de l’Eveil pour la citoyenneté et le développement (ECIDE) a été enlevé au siège de son parti pendant qu’il tenait une réunion avec les cadres de sa formation politique. A en croire un témoin de l’évènement qui a réagi sur Radio France Internationale, une dizaine de militaires, « armés jusqu’aux dents », conduits par le colonel Vincent Ntambwe ont brutalisé le député Fayulu et l’ont projeté de force dans un véhicule 4×4 des FARDC (Forces armées de la RDC) avant de l’amener à une destination qui n’a été connue que tard dans la soirée, le camp Lieutenant-colonel Kokolo.
« Je confirme l’enlèvement de l’honorable Martin Fayulu, président du parti politique ECIDE. C’était au siège de son parti où il était ensemble avec les cadres du parti en train de préparer la journée du 16 février, alors surgit un certain colonel, vers 14 heures 30, à bord d’un 4X4 de l’armée congolaise. Et ils ont procédé à l’enlèvement de l’honorable député qui est maintenant entre leurs mains. Nous sommes en train de le chercher pour savoir où est-ce qu’on l’a amené. [Ce serait, Ndlr] entre le camp Kokolo et la DEMIAP [Détection des Milices Anti-Patrie, Ndlr]», avait réagi, un peu plus tôt, Jean-Marie Kabengele, avocat de Martin Fayulu, avant de le localiser plus tard au camp Kokolo.
Une arrestation qui a provoqué un déluge de réactions aussi bien sur le plan politique que chez les ONG des droits de l’homme. C’est une tentative d’intimidation, estime Vital Kamerhe, président de l’Union pour la nation congolaise (UNC). Cet opposant a « exigé la libération immédiate » de Martin Fayulu qui, selon lui, n’aurait jamais dû être arrêté puisqu’il dispose de l’immunité parlementaire.
Freddy Matungulu, initiateur du parti d’opposition Congo Na Biso a, sur son compte Twitter, posté ceci : « Congo Na Biso exige la libération immédiate et sans condition de Martin Fayulu et exprime ses encouragements et toute sa sympathie aux membres et cadres de l’ECIDE »
Minaku surpris…
Le député/UNC Jean-Baudouin Mayo, visiblement exaspéré par cette arrestation, poste ceci sur Facebook : «…sans considération de ses immunités ni information préalable du président de l’Assemblée nationale surpris lorsque je lui ai donné l’information. C’est une situation grave qui permet d’affirmer dans la tête du pouvoir, il n’y a plus de constitution. Nous sommes donc en insécurité totale. C’est pourquoi le combat doit être radicalisé. Il n’y a pas de dialogue avec des gens qui n’ont aucun respect pour la constitution et les droits de l’homme. La RDC est devenue une jungle. Nous devons redresser cette situation sans transiger. »
Dans sa réaction, Aubin Minaku, a semblé être surpris par cet enlèvement. « Quels que soient les faits qui pourraient lui être reprochés, il ne devrait pas être détenu », a indiqué le président de la Chambre basse du Parlement. Avant de préciser qu’il a sollicité le Parquet général pour sa libération. Du côté de Lambert Mende, porte-parole du gouvernement, l’opposant est entendu par un magistrat au camp Kokolo. Martin Fayulu est un député, il devrait être relâché, a-t-il poursuivi.
Vives restrictions des libertés…
L’acte d’enlèvement est perçu d’un très mauvais œil de la part des organisations des droits de l’homme. « Arrêter un leader d’opposition est un pas supplémentaire très sérieux qui confirme que l’espace politique continue de se réduire et qu’il y a de plus en plus des restrictions des droits et des libertés en RDC », a déclaré le chef du Bureau conjoint des Nations unies aux droits de l’homme. La même inquiétude est exprimée du côté de l’ONG Human Right Watch.
Dido Nsapu