Après le communiqué officiel du ministère des Affaires étrangères annonçant la caducité des anciens passeports semi-biométrique à dater du 16 octobre, c’est la grande colère dans les milieux des Congolais qui contestent une décision « irresponsable » d’un gouvernement qui chercherait rien d’autre qu’à les racketter.
C’est la grande controverse de la fin de la semaine dernière. Un communiqué officiel, signé le 15 septembre par Aggée Aje Matembo, vice-ministre des Affaires étrangères, aura suffi pour surchauffer les esprits.
Le document stipule qu’à dater du 16 octobre, les « anciens passeports congolais semi-biométriques encore en circulation n’auront plus de cours légal sur toute l’étendue de la République démocratique du Congo. Les détenteurs de ces passeports ne pourront plus être autorisés à franchir la frontière tant à l’entrée qu’à la sortie du territoire national.»
Justification : « impératif d’uniformiser l’identification des citoyens lié à des considérations sécuritaires ».
Vite, les réactions des Congolais, qui se voient obliger de débourser encore plus de 185 dollars, pour le nouveau passeport, ne se sont pas fait attendre. Sur les réseaux sociaux notamment, l’on crie au scandale, à l’extorsion…
« L’Etat moyibi, l’Etat moyini », reprennent en chœur plusieurs compatriotes dans leurs comptes facebook.
« J’ai tourné et retourné dans tous les sens la décision du ministère des Affaires étrangères sur le passeport, je n’arrive toujours pas à en saisir les véritables motivations », écrit un autre internaute.
Même un cadre connu de la Majorité présidentielle, Yves Kisombe, n’en revient pas.
« Je poserai la question à mon successeur et ami Aje Matembo car je ne comprends pas très bien non plus. En principe, un passeport ne perd pas sa validité avant l’échéance qui y figure, d’autant que des visas en cours de validité peuvent y trouver », a réagi celui qui, il y a quatre mois, était encore vice-ministre des Affaires étrangères.
DIFFICILE A CONVAINCRE
Tout le monde n’y comprend rien. Sauf le gouvernement qui, dans une mise au point lue sur la télévision nationale par Lambert Mende, son porte-parole, a donné des raisons sécuritaires, d’harmonisation et de fiabilité.
« Certes, lors du lancement biométrique, le gouvernement avait annoncé que les anciens passeports semi-biométriques resteront en circulation jusqu’à l’expiration de leur validité. Force est de reconnaître cependant que face aux défis sécuritaires et migratoires du moment, le gouvernement congolais ne peut plus autoriser la circulation concomitante de ces deux documents. Le gouvernement congolais tient donc à rassurer la population que c’est pour son bien-être que cette décision a été prise », lit-on dans cette mise au point gouvernementale.
Pas sûr de convaincre cette même population qui, lors du lancement officiel, le 10 novembre 2015, du passeport à puce biométrique, s’était déjà rassuré quand Raymond Tshibanda, alors ministre des Affaires étrangères, avait déclaré que l’ancien passeport «sera utilisé concomitamment avec l’ancien passeport semi-biométrique jusqu’à l’expiration de ce dernier ». Or, son expiration devrait attendre jusqu’à 2020.
De 100 dollars pour l’ancien passeport, le nouveau passeport coûte officiellement 185 dollars. Sans compter les différentes tracasseries administratives qui obligent souvent certaines personnes à dépenser dans les 300 dollars.
Déjà dans son prix officiel, le passeport congolais est l’un des plus chers du monde. Alors qu’il est difficile à cette population de digérer ce prix exorbitant dont seulement 65 dollars profitent à l’Etat congolais, soit 35%, voilà un autre casse-tête.
Selon une enquête de Reuters, les 120 dollars restants sont partagés entre les sociétés fournisseurs Semlex, une entreprise basée en Belgique, qui produit des documents de voyage (passeports, cartes d’identité,…) et à une petite société basée dans le Golfe persique dans des contours plus que flous.
A craindre est que ce nouveau dossier suspendant les passeports semi-biométriques passe pour un scandale de trop chez cette même population que le gouvernement tente de convaincre.
CN